Au départ, il y a la poésie, Verlaine devant la classe ; le directeur qui filme un gamin en culottes courtes : « les petits ifs du cimetière frémissent au vent hiémal dans la glaciale lumière ».
Puis plus rien.
Des années à faire autre chose, le sport, les filles, les enfants, le travail, les amis, les emmerdements, le quotidien qui écrase et le théâtre qui surgit au détour d’un village et d’un bicentenaire de Révolution. La magie des planches, le désir de jouer, d’être soi dans cet espace clos, entre cour et jardin, à l’abri de son ombre dans la lumière des projecteurs.
Le printemps des poètes : encore une idée de Jack Lang. Tiens ! je vais replonger dans l’enfance : Baudelaire, Rimbaud, Prévert, Heredia et son vol de gerfauts……. Le plaisir. Dire des vers, donner à entendre de la poésie. Alors oui se produire, mais comment ? Les poèmes aimés, mais dans quel ordre ? Une heure de poésie sans fil conducteur ? Barbant non ?
Je relis les "Fleurs du Mal" ! J’ai trouvé ! Ce sera le poète de l’amour et du sexe, de la ville, de la foule, des becs de gaz, de la boue, des cloaques, des crépuscules du matin et du soir, du vin, des petites vieilles, de Jeanne Duval et de la présidente. Ce sera ce morceau d’anthologie à travers vingt poèmes, avec un début, lecteur, et une fin, au fond de l’infini, pour trouver du nouveau.
Il me faut de la musique. L’enfance toujours, l’apprentissage du hautbois. Le professeur qui terrorise, qui vitupère, le solfège qui dessèche le cœur. Je m’arrête mais je reste accroché à cette musique qui berce ma vie. « Music is your only friend » disait Jim, l’ange noir ! Mon spectacle sera musical ou ne sera pas.
Un violoncelle ! parce que c’est le plus proche de la voix ! Parce que j’aime cet instrument. Je cherche ! je trouve ! Valentin me suivra au gré de mes errances.
Je vais créer ma compagnie. Elle s’appellera Elégie ! Elégie pour la nostalgie, pour la plainte douloureuse, pour les sentiments mélancoliques. Puis Elégie parce que Fauré et son Elégie pour violoncelle et piano.
J’ai huit ans ! non cinquante- cinq ! Peu importe ! Il n’est jamais trop tard pour vivre ses rêves.
J’ai cinquante- cinq ans et je viens de créer ma compagnie : la Compagnie Elégie !